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Ma première Garde à vue – 1ere partie

Miriam Makeba - Mama Africa

Miriam Makeba – Mama Africa

28 septembre 2015 Commentaires (6) Vues: 5660 Article

Ces femmes qui changent la donne

Poppers Mag se lance dans l’article participatif. Ce top 5 des femmes qui ont compté dans l’Histoire et l’évolution de la condition féminine est bien sûr non exhaustif et ne constitue que la première partie d’une série qui, je l’espère, sera longue. C’est pourquoi je t’invite à faire une ou plusieurs suggestions dans les commentaires de cet article et qui sait ? peut-être auras-tu la chance de voir ta suggestion figurer dans les diverses suites de ce top ! 

Dans un monde qui m’apparaît de plus en plus comme dominé par la gent masculine, il semble urgent et nécessaire de te rendre hommage, à toi ma soeur, ma mère, ma femme. Toi qui m’a porté et supporté. Il est temps que tu te révoltes et réinventes le monde que t’ont laissé tes pères. Non, la femme libre n’est pas à l’image de Beyonce une bonasse bruyante au popotin divin. La femme n’est pas non plus à l’image de ces connasses neurasthéniques photoshopées qui ressortent sur google lorsque l’on tape le mot “femme” dans le moteur de recherche américain. Ce qui nous amène à une question fondamentale : qu’est-ce que la femme ? Peut-on la réduire aux titres familiaux et matrimoniaux que j’ai cités auparavant, révélant au passage mon puissant ancrage masculin ? Ou bien est-elle l’égale de l’homme, ce qui reviendrait à dire qu’en définitive, la femme n’est qu’un autre homme ?

Cette question a taraudé et continue de triturer les méninges d’un bon nombre de penseurs. Dans son ouvrage Les Femmes et la Vie Ordinaire, feu le sociologue et historien américain Christopher Lasch retrace l’évolution de cette question dans les littératures anglaise et américaine, de l’époque classique jusqu’à sa mort, à la fin du XXème siècle. De la querelle des femme du XIIIème siècle à l’essor des banlieues américaines et aux réflexions post-industrielles, Lasch tente de retracer l’histoire de la réflexion féministe et nous apporte sur la question quelques éléments passionnants. Mais là où les choses deviennent réellement intéressantes, c’est lorsque le sociologue américain sort du carcan de l’étude de texte et commence à nous interroger sur le réel et les aspirations actuelles de la femme moderne. Nous en revenons alors à la question de départ et il devient indispensable de se demander si le désir réel de la femme ne se limite qu’à la volonté de devenir un pendant féminin de l’homme, une force de travail et une source de revenu et de rivalité supplémentaire ? Vu sous cet angle, il semble logique de vouloir remettre en cause ces définitions simplistes. Dès lors, il devient possible de carrément s’enflammer et se demander si la femme ne serait pas finalement la réponse à tous nos maux ? Ou rien de tout cela ? Vers la fin de son analyse, Lasch mentionne le progressisme (qui s’oppose au conservatisme, deux idéologies manichéennes au possible dont la simplicité devrait tout de suite vous mettre la puce à l’oreille) et nous dit : “Le progressisme représentait une tentative très réussie de déviation du populisme, du radicalisme travailliste, et d’autres mouvements potentiellement révolutionnaires, par une réforme de la société, à partir du sommet.

Les femmes que nous mettrons en avant dans cette série seront toutes allées à l’encontre de cette définition : elles auront toutes contribué à changer la société par le bas, en partant du peuple vers les classes dirigeantes et non pas le contraire.

Femmes---RosaParks

Rosa Parks

Quand on parle de révolution par le bas, l’exemple de Rosa Parks est particulièrement frappant. Une femme ordinaire a changé la société américaine et le cours de l’Histoire. Elle se retrouve propulsée sur les devants de la scène d’un conflit vieux de plusieurs siècles du fait de sa simplicité. En refusant de se lever d’une place réservée aux blancs dans un bus d’Alabama, elle brave une loi scélérate mais cède du même coup à une fatigue physique et morale longue de plusieurs siècles. Une fois arrêtée et la machine lancée, Parks ne reculera plus. Elle continuera d’avancer, de provoquer. Si l’incident du bus reste dans les mémoires, l’action militante de Rosa Parks commence bien plus tôt. D’ailleurs, d’autres avant elle avaient refusé de se lever des places réservées aux blancs dans le bus sans pour autant mettre le feu aux poudres. Le destin prend parfois des tournures inattendues et c’est l’acte de Rosa Parks qui déclencha les hostilités. C’est peut-être parce que dans cette action, on peut ressentir la force profonde d’une femme discrète qui s’est battue toute sa vie en tant que noire bien sûr mais aussi en tant que femme et mère. En 1955, au moment du bus, Rosa Parks est parvenue à finir ses études secondaires, chose rare pour une femme noire de cette époque. Elle cumule les petits boulots pour faire vivre sa famille et est active depuis plus de 10 ans dans la lutte des droits civiques. Le 1er décembre 1955, Rosa Parks a simplement refusé de céder. Elle cesse de subir la loi des autres et devient ce jour là, un symbole de désobéissance civile.

Femmes---FridaFrida Kahlo

Que n’a-t-on déjà dit sur la peintre mexicaine ? Dans un article précédent, brillamment écrit (hein ?), nous avions déjà pu voir comment la Kahlo menait tout son monde à la baguette et comment elle avait su, par sa grâce et son intelligence, surpasser moralement et intellectuellement ses 2 amants et modèles les plus célèbres : Leon Trotski et Diego Rivera. A travers une vie riche en rebondissements et lots de malheurs, Frida a su ouvrir une brèche dans le milieu fermé et blindé en testostérone de l’art et de la peinture en produisant des toiles surréalistes d’une force sans commune mesure. Elle a ouvert la porte à l’introspection la plus dure, la plus sordide mais aussi la plus sincère qui soit. Elle a exposé son corps meurtri, sa sexualité débordante et son beau sexe de manière crue et vive faisant de sa peinture l’exutoire de ses joies les plus fortes ou de ses malheurs les plus profonds. Ses toiles sont également une manière forte d’affirmer, de référencer et d’exposer à la face du monde tous les éléments qui composent son riche héritage culturel de mexicaine créole et de faire exister sa culture sur la scène artistique mondiale. A travers son art, Frida Kahlo nous apporte une définition intime et prégnante de ce qu’est le Mexique, de son histoire personnelle, ainsi qu’un visuel clair, fourni et puissant de ce qu’une femme renferme en elle.

Femmes---OlympeOlympe de Gouges

Olympe de Gouges est un cas un peu particulier, ambigu. Née Marie Gouze en 1748, de très petite bourgeoisie, c’est par le mariage (et surtout le veuvage) qu’elle gravit l’échelle sociale pour finir en bonne bourgeoise royaliste décapitée en 1793 par la révolution et les jacobins. Donc a priori, une femme tout ce qu’il y a de plus classique au XVIIIème siècle. Pourtant l’oeuvre d’Olympe de Gouges n’a rien d’anodin. A travers des pièces de théâtre, des lettres ouvertes, des affiches mais aussi et surtout sa rédaction des Droits de la femme, elle aura joué un rôle primordial et plutôt précurseur dans l’évolution de la condition féminine mais également dans la lutte contre l’esclavage. Pour ce qui est de la condition féminine, elle poursuit la réflexion engagée au cours des siècle que Lasch appelle “la querelle amoureuse” (à savoir les petites luttes verbales entre hommes et femmes au sujet de leur différents rôles dans le couple mais aussi au sein de la société) et prend le parti d’affirmer que les deux sexes ne sont pas égaux (en ce qu’ils sont dotés différement par la nature) mais qu’ils doivent cependant l’être devant la loi. En ce sens, elle voit rapidement l’enjeu de la Révolution (qu’elle ne remet pas en question malgré sa loyauté au roi) à savoir le contrôle du patrimoine et des institutions, et décerne les failles de la philosophie des Lumières. Elle se propose de partager ces enjeux de manière plus équitable entre hommes et femmes en faisant de ces dernières les garantes morales de la Révolution. Elle suggère de repenser l’éducation et de revoir le contrat de mariage afin que la femme bénéficie de plus de libertés mais aussi de pouvoirs juridiques contre les hommes. En définitive, si son discours et ses intentions semblent parfois ambigües, ses propositions vont dans le sens d’une atténuation des différences inter-sexes mais aussi inter-classes à travers une répartition des richesses et des droits plus équitable. Ce qui explique également ses positions avant-gardistes sur l’esclavage. Son attachement à la royauté ainsi que ses dénonciations publiques lui vaudront finalement de perdre la tête… littéralement.

Femmes---Joni-MitchellJoni Mitchell

La chanteuse canadienne est un oiseau (trop) rare dans le paysage musical et artistique contemporain. En effet, en y réfléchissant bien, peu d’artistes ont autant marqué leur génération et les suivantes. C’est bien simple, à ce jour, je ne connais pas de meilleure chanteuse blanche (oui, faut pas déconner) que Joni Mitchell. Mais le propos n’est pas là et je m’égare. La singularité de Joni Mitchell réside dans le fait qu’elle est une des rares femmes à s’être réellement imposée sur la scène musicale américaine et mondiale des années 70. C’est également une des seules vraies artistes à avoir laissé son empreinte dans un milieu qui a rapidement tourné au vinaigre de la commercialisation à tout va et qui a perdu son âme d’artiste en moins de 20 ans. Traversant les genres, de la folk au jazz, Mitchell est parvenue à se faire accepter et reconnaître de ses pairs mais là encore, je digresse. Si la belle canadienne est connue depuis toujours pour son engagement politique et ses positions fortes, sa contribution artistique et sociale culmine à un moment précis de sa vie. Elle remonte à la parution de son album phare : Blue. Cet enregistrement est une confession, une Saint Augustinade revisitée par Joni Mitchell, abordant tous les sujets qui pèsent sur ses épaules à l’époques : ses amours, sa fille qu’elle a dû abandonner très tôt, le sexe, le rejet. Le tout est traité d’une manière totalement nouvelle, brute et fraîche qui choqua nombre d’auditeurs en 1971. A travers ce disque et tout au long de sa carrière, Joni Mitchell démontra qu’il existait un autre point de vue que celui des hommes ou de la jeune fille niaise.

Femmes---Emma-Goldman (1)Emma Goldman

Personnage méconnu dans nos vertes contrées, Emma Goldman fut le genre d’épine se logeant directement dans le pied des gouvernements en place que les politiciens tentent d’extirper coûte que coûte. Activiste anarchiste d’origine russe née en 1869 dans une famille juive modeste dans ce qui est aujourd’hui la Lituanie, Goldman a une enfance rude et se voit contrainte à travailler très tôt, durant l’âge d’or de la révolution industrielle. Battue par son père et brutalisée par d’autres hommes, elle développe rapidement une force de caractère remarquable qu’elle forge au contact des lectures les plus engagées et en se frottant aux groupes syndicaux et anarchistes de son pays. Vers ses 15 ans, alors que son père souhaite la marier de force, elle quitte la Russie pour s’établir chez sa demi-soeur aux Etats-Unis. Elle commence à effectuer des traveaux longs et pénibles pour un salaire de misère dans les usines locales et poursuit son apprentissage aux contacts de groupes socialistes et anarchistes américains. A la suite d’un premier mariage raté, elle part pour New York et commence à participer à des manifestations. Il faut dire que si l’industrie américaine se porte bien, le peuple meurt de faim à cette époque.

Au fil du temps et des rencontres, elle en vient à s’exprimer en public et à s’affirmer auprès de ses mentors. Ses idées s’afinent et son discours monte en volume. Elle devient une figure forte de la lutte anarchiste et féministe de l’époque. Elle développe des idées fortes et sans équivoque dans de nombreux écrits qu’elle publie dans des gazettes locales et commence ainsi à devenir sérieusement encombrante pour le gouvernement américain. Ses positions anti-militaristes pendant la 1ère guerre mondiale lui vallent finalement d’être expulsée (par un Egard J. Hoover alors tout jeune) des Etats-Unis. De retour en Russie, elle met tout de suite la main à la pâte et se joint aux bolcheviks pour la révolution. Mais là encore, elle est déçue par les leaders de la révolution et ses positions affirmées (notamment pour une liberté totale d’expression et de presse et contre le totalitarisme) déplaisent à certains comme Lénine. Elle quittera finalement l’URSS en 1921 pour dénoncer très vite les dérives du gouvernement bolchévik. Après cela, Emma Goldman continuera de parcourir le monde (s’arrêtant notamment dans une Catalogne qui résiste alors à Franco) en continuant de lutter pour ses idéaux anarchistes et anticapitalistes.

Bibliographie

Les femmes et la vie ordinaire – Christopher Lasch

“Femme, réveille-toi” Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne et autres écrits – Olympe de Gouges

Will You Take Me as I am : Joni Mitchell’s Blue Period – Michelle Mercer

Illustration : J.Bardaman

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6 Commentaires - Ces femmes qui changent la donne

  1. Julia dit :

    Bravo!!!! J’adore cet article! 🙂

    Je propose les femmes suivantes:

    – Wangari Maathai, une biologiste kényane et une professeure d’anatomie en médecine vétérinaire. Elle est connue pour son militantisme politique et écologiste car elle a a fondé le mouvement de la Ceinture verte (Green Belt Movement) en 1977. Elle était la première femme africaine à recevoir le Nobel de la paix pour sa contribution en faveur du développement durable, de la démocratie et de la paix.

    – Waris Dirie est une écrivain, ancien mannequin et actrice du Somalie. Elle a crée la Fundation “Desert Flower Foundation” pour lutter contre les mutilations sexuelles. En plus, elle a été, durant plusieurs années, ambassadrice de l’ONU, chargée des questions de mutilations sexuelles.

    – Masarrat Misbah, une styliste et chirurgienne plastique en provenance du Pakistan. Elle a crée une Fundation pour aider des femmes qui ont été victimes d’ attaques à l’acide de se faire opérer gratuitement et leurs formés comme esthéticiennes pour leur offrir des alternatives.

  2. Sarah M dit :

    Je suggère Charlotte Perriand et Mamah Borthwick .

    Je te laisse le soin de découvrir par toi même pourquoi, en lisant sur la vie de ces femmes !

    Merci pour l’article !

  3. Stephanie dit :

    Super article !

    Voici quelques suggestions :

    Caroline Matilda
    Mary Wollstonecraft
    Georgia O’Keeffe
    Nawal El Saadawi
    Chimamanda Ngozi Adichie ( trop évident peut-être mais je l’adore ! )

  4. Brian dit :

    Je suggère Sister Helen Prejean http://www.sisterhelen.org/biography/ et Mary Harris Jones.

  5. Cecile dit :

    Simone Weil
    Elisabeth Vigee Le Brun
    Germaine TILLION
    Louise Michel
    Francoise Dolto
    Sœur Theresa

    Avec une préférence pour Simone Weil qui s’est battue pour la cause des femmes face à des députés hommes….ces derniers venant de remettre le couvert en rejetant la proposition de loi pour baisser la TVA sur les produits d’hygiène féminine considérés comme produits de première nécessité dans la proposition. J’invite toutes les femmes à leur envoyer leurs tampax !!!

  6. greg dit :

    Bel article sur ces femmes etonnantes bien que toutes différentes

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